Le dossier médical en santé au travail

Posté le 22 novembre 2022

Un dossier médical en santé au travail (DMST) doit être constitué pour chaque salarié dans le cadre du suivi individuel de leur état de santé dans un service de prévention et de santé au travail (SPST) (C. trav. art. L 4624-1 et L 4624-8).

La loi du 2-8-2021 pour renforcer la prévention en santé au travail a modifié les règles d’élaboration, d’accessibilité et de conservation du DMST. Les modalités de constitution du DMST, ses données, les modalités d’accès et d’alimentation du dossier par les différents professionnels des SPST, l’information du salarié sur son droit d’opposition à l’accès à ses données et les modalités d’échanges d’informations entre professionnels de santé ont enfin été fixées par le décret 2022-1434 du 15-11-2022 (JO du 16). Ces modalités s’appliquent depuis le 17-11-2022, sauf exceptions.

Mise en œuvre du DMST. Le DMST du salarié doit être constitué par les professionnels de santé du SPST, à savoir le médecin du travail ou, le cas échéant, sous son autorité, par le collaborateur médecin, l’interne en médecine du travail  ou l’infirmier.

Le DMST doit retracer dans le respect du secret médical les informations relatives à l’état de santé du salarié et aux expositions auxquelles il a été soumis, ainsi que les avis et propositions du médecin du travail (notamment les proposition de mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou de mesures d’aménagement du temps de travail justifiées par notamment à l’âge ou à l’état de santé physique et mental du travailleur ou l’avis d’inaptitude éclairé par des conclusions écrites, assorties d’indications relatives au reclassement du salarié, C. trav. art. L 4624-3 et L 4624-4).

Constitution sous format numérique sécurisé. Le DMST doit être constitué sous format numérique sécurisé par les professionnels de santé au travail pour chaque salarié bénéficiant d’un suivi individuel de son état de santé dans un SPST. Le traitement des données du DMST est placé sous la responsabilité du SPST pour le respect des obligations légales auxquelles il est soumis, conformément au RGPD (C. trav. art. R 4624-45-3).

Droit d’accès au DMST. Le DMST doit être accessible au médecin praticien correspondant ainsi qu’aux professionnels de santé du SPST chargés d’assurer, sous l’autorité du médecin du travail, le suivi de l’état de santé d’un salarié, sauf opposition de celui-ci (C. trav. art. L 4624-8).

Lorsque le salarié relève de plusieurs SPST ou cesse de relever d’un de ces services, son DMST est accessible au service compétent pour assurer la continuité du suivi, sauf refus du salarié.

En cas de risque pour la santé publique ou à sa demande, le médecin du travail doit le transmettre au médecin inspecteur du travail. Le salarié (ou en cas de décès de celui-ci toute personne autorisée) peut demander la communication de ce dossier.

Pour chaque titulaire, l’identifiant du DMST est son numéro de sécurité sociale (identifiant national de santé C. santé publique art. L 1111-8-1).

Contenu du DMST. Le médecin du travail ou, le cas échéant, l’un des professionnels de santé du SPST doit saisir dans le DMST l’ensemble des données d’exposition du salarié à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels (liés aux contraintes physiques marquées, à l’environnement physique agressif et aux rythmes de travail, C. trav. art. L 4161-1) ou toute autre donnée d’exposition à un risque professionnel qu’il estime de nature à affecter l’état de santé du salarié.

Pour la collecte de ces données, le médecin du travail ou le professionnel de santé doit tenir compte des études de poste, des fiches de données de sécurité transmises par l’employeur, du document unique d’évaluation des risques professionnels (Duerp) et de la fiche d’entreprise.

Les informations relatives à ces expositions sont confidentielles et ne peuvent pas être communiquées à un employeur auprès duquel le salarié sollicite un emploi.

Le DMST doit comprendre les éléments suivants :

– les données d’identité, incluant le numéro de sécurité sociale, les données médico-administratives du salarié nécessaires à la coordination de sa prise en charge en matière de santé et, le cas échéant, les données d’identité et de contact de son médecin traitant ;
– les informations permettant de connaître les risques actuels ou passés auxquels le salarié est ou a été exposé, notamment les informations relatives aux caractéristiques du ou des postes de travail et au secteur d’activité dans lequel il exerce, les données d’exposition à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels ou toute autre donnée d’exposition à un risque professionnel de nature à affecter l’état de santé du salarié, ainsi que les mesures de prévention mises en place ;
les informations relatives à l’état de santé du salarié recueillies lors des visites et examens nécessaires au suivi individuel de son état de santé ;
les correspondances échangées entre professionnels de santé aux fins de la coordination et de la continuité de la prise en charge du salarié ;
– les informations formalisées concernant les attestations, avis et propositions des professionnels de santé au travail, les informations délivrées au salarié sur les expositions professionnelles, les risques identifiés, les moyens de protection, l’existence ou l’absence d’une pathologie en lien possible avec une exposition professionnelle, ainsi que les avis médicaux ;
– la mention de l’information du salarié sur ses droits en matière d’accès aux données le concernant et sur les conditions d’accès à son DMST ;
– le cas échéant, le consentement ou l’opposition du salarié au recours des pratiques médicales ou de soins à distance ou à la transmission des données de son DMST (C. trav. art. R 4624-45-4).

Alimentation du DMST. L’alimentation et la consultation du DMST du salarié peuvent être réalisées par le médecin du travail et par le collaborateur médecin, l’interne en médecine du travail, l’infirmier, l’intervenant en prévention des risques professionnels et l’assistant de SPST, sur délégation du médecin du travail et sous sa responsabilité.

L’alimentation et la consultation du DMST doivent respecter les règles de confidentialité et les règles d’identification électronique et d’interopérabilité définies par les référentiels précisées par le Code de la santé publique (art. L 1110-4, I, L 1470-1 à L 1470-5). Toutes les actions réalisées sur le dossier médical, quel qu’en soit l’auteur, doivent être tracées et conservées dans le DMST, notamment la date, l’heure, et l’identification du professionnel du SPST (C. trav. art. R 4624-45-5).

Information du salarié sur son droit d’opposition. Le salarié doit être informé, par tout moyen, y compris dématérialisé, lors de la création de son DMST et lorsqu’il relève de plusieurs SPST ou cesse de relever de l’un de ces services :

– qu’il peut s’opposer à l’accès à son DMST du médecin praticien correspondant ou des professionnels de santé chargés d’assurer, sous l’autorité du médecin du travail, le suivi de son état de santé ;
– qu’il peut s’opposer à l’accès des professionnels de santé chargés du suivi de son état de santé aux DMST dont il est titulaire et qui sont détenus par d’autres SPST.

La délivrance de ces informations et l’exercice de l’un de ces droits d’opposition doivent être retracés dans le DMST (C. trav. art. R 4624-45-6).

En revanche, le salarié ne peut pas s’opposer à la constitution et à l’alimentation de son DMST (C. trav. art. R 4624-45-8).

Transmission du DMST aux SPST. Lorsqu’un salarié relève de plusieurs SPST ou cesse de relever d’un de ces services, le service compétent pour assurer la continuité du suivi du salarié peut demander la transmission de son DMST, sauf si le salarié a déjà exprimé son opposition à cette transmission. Le service demandeur doit informer le salarié et s’assurer qu’il ne s’oppose pas à la transmission. En l’absence d’opposition du salarié, son DMST est transmis par messagerie sécurisée au service demandeur.

Les informations concernant des tiers n’intervenant pas dans le suivi individuel de l’état de santé ne sont communicables que dans la mesure où elles sont strictement nécessaires à la continuité du suivi (C. trav. art. R 4624-45-7).

Communication au salarié de son DMST.  Le salarié ou, en cas de décès de celui-ci, toute personne autorisée (C. santé publique art. L 1110-4 et L 1111-7), peut demander la communication de son DMST sous format papier ou dématérialisé. Le salarié peut exercer auprès du SPST ses droits de rectification, d’effacement et de limitation prévus par le RGPD (C. trav. art. R 4624-45-8).

Conservation du DMST durant 40 ans. Les informations concernant la santé des salariés doivent être soit conservées au sein des SPST qui les ont recueillies, soit déposées par les SPST auprès d’un organisme hébergeur. Le SPST doit veiller à ce que toutes dispositions soient prises pour assurer la confidentialité des informations ainsi conservées ou hébergées.

Le DMST doit être conservé pendant une durée de 40 ans à compter de la date de la dernière visite ou examen du salarié titulaire au sein du SPST concerné, dans la limite d’une durée de 10 ans à compter de la date du décès de la personne titulaire du dossier.

Cependant, ces délais sont suspendus par l’introduction de tout recours gracieux ou contentieux tendant à mettre en cause la responsabilité médicale du SPST ou de professionnels de santé à raison de leurs interventions au sein du service.

Lorsque la durée de conservation d’un DMST doit s’achever avant la durée mentionnée à l’article R 4412-55 (50 ans après la fin de la période d’exposition à des agents chimiques dangereux), à l’article R 4426-9 (40 après la cessation de l’exposition à des agents biologiques) et à l’article R 4451-83 du Code du travail (50 ans après la fin de l’exposition aux rayonnements ionisants ou jusqu’au moment où le salarié exposé à des rayonnements ionisants a atteint l’âge de 75 ans), la conservation du dossier est prorogée jusqu’aux échéances prévues par ces articles (C. trav. art. R 4624-45-9).

À noter. Chaque salarié susceptible d’être exposé à des agents biologiques pathogènes bénéficiait d’un dossier médical spécial est tenu par le médecin du travail ou le professionnel de santé du SPST, et une mention de ce dossier spécial était faite au DMST. Désormais, les salariés susceptibles d’être exposés à des agents biologiques pathogènes ne bénéficient plus désormais du dossier médical spécial mentionné dans le DMST, mais ils bénéficient uniquement du DMST (C. trav. art. R 4426-8 ; décret 2022-1434 art. 4, 2°).

Date d’entrée en vigueur. Ces modalités de mise en œuvre du DMST sont entrées en vigueur le lendemain de sa publication, soit le 17-11-2022. Cependant, les DMST créés à compter de la publication du présent décret, soit à compter du 16-11-2022 et ceux, établis avant le 16-11-2022 des salariés toujours suivis à cette même date par un SPST devront se conformer à ces nouvelles dispositions sur la constitution sous format numérique sécurisé du DMST (C. trav. art. R 4624-45-3) et sur son contenu (C. trav. art. R 4624-45-4) au plus tard le 31-11-2023.

Les DMST établis avant le 16-11-2022 des salariés qui ne sont plus suivis à cette date par un SPST restent régis par les dispositions du Code du travail, dans leur rédaction antérieure au présent décret,  sauf concernant les nouvelles modalités relatives à la communication, à l’hébergement et à la conservation des dossiers qui leur sont applicables (décret 2022-1434 art. 5).

Sources : décret 2022-1434 du 15-11-2022, JO du 16 ; Loi 2021-1018 du 2-8-2021 art. 16 et 21, JO du 3 ; C. trav. art. L 4624-8

© Lefebvre Dalloz

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