Projet de budget de la sécurité sociale pour 2024 1/2

Posté le 10 octobre 2023

Contrôle Urssaf

 

Pour renforcer l’efficacité de la lutte contre la fraude sociale, les prérogatives des agents des Urssaf (ou des CGSS ou des CMSA) chargés du contrôle en matière de requalification des faits et des actes de fraude sont clarifiées et la procédure d’abus de droit est simplifiée pour la rendre plus opérationnelle (PLFSS pour 2024 art. 5, I, 9° à 12° et 5, II).

 

Prérogatives des agents de contrôle : droit de requalifier les faits et actes juridiques. Le contrôle de l’application des dispositions du Code de la sécurité sociale par les employeurs et les travailleurs indépendants est confié aux Urssaf. Les agents chargés du contrôle sont assermentés et agréés et ont qualité pour dresser en cas d’infraction aux dispositions légales et réglementaires des procès-verbaux faisant foi jusqu’à preuve du contraire (CCS art. L 243-7).

 

Pour éviter toute équivoque sur les prérogatives des agents chargés du contrôle, le PLFSS pour 2024 précise que dans le cadre de leurs missions de contrôle, les agents chargés du contrôle ne seraient pas tenus par la qualification donnée par la personne contrôlée aux faits qui leur sont soumis (PLFSS pour 2024 art. 5, I, 10° ; CSS art. L 243-7, al. 1 modifié). Ce pouvoir des agents de contrôle de requalifier les faits et actes juridiques serait donc reconnu de façon explicite par la loi.

 

Procédure d’abus de droit. La procédure d’abus de droit social permet au directeur de l’Urssaf (ou aux CGSS ou aux CMSA) d’écarter un acte, comme ne leur étant pas opposable, qui revêt un caractère fictif ou qui, bien que constituant une application littérale des textes, a pour seul but que d’éluder ou d’atténuer le montant des contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle dues par le cotisant au titre de la législation sociale ou que le cotisant aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles, s’il n’avait pas passé ces actes (CSS art. L 243-7-2, al. 1).

L’intérêt pour l’Urssaf de recourir à cette procédure est double : l’acte qualifié d’abusif ne lui est pas opposable et l’Urssaf peut infliger à l’entreprise une pénalité égale à 20 % du montant des cotisations et contributions dues.

 

En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement de l’abus de droit, le cotisant peut demander l’avis du comité des abus de droit, puis, si besoin, contester les sommes redressées devant la juridiction de la sécurité sociale. L’Urssaf peut également, soumettre le litige à l’avis de ce comité. Quel que soit l’avis rendu par le comité, l’Urssaf doit supporter la charge de la preuve en cas de réclamation.

 

Nouvelle procédure. À compter du 1-1-2024, la procédure d’abus de droit serait transformée en une procédure de sanction administrative prononcée par le directeur de l’Urssaf. En cas de constat par l’agent de contrôle d’un abus de droit, celui-ci procèderait au redressement des cotisations et contributions sociales non acquittées et proposerait au directeur de l’Urssaf d’appliquer une pénalité pour abus de droit égale à 20 % du montant des cotisations et contributions sociales dues, dans des conditions déterminées par décret.

 

Suppression de la saisine du comité d’abus de droit en cas de désaccord. En cas de contestation sur les montants redressés sur le fondement de l’abus de droit, le cotisant ne pourrait plus demander l’avis du comité des abus de droit, qui n’existerait plus, mais il pourrait exercer les recours habituels (recours devant la commission de recours amiable, puis contentieux devant le juge). La charge de la preuve serait supportée par l’Urssaf (PLFSS pour 2024 art. 5, I, 11° et 12° et 5, VI ; CSS art. L 243-7-2 modifié).

L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) n’aurait plus à autoriser les Urssaf à saisir le comité d’abus de droit pour lui soumettre le litige, car celui-ci disparaîtrait (PLFSS pour 2024 art. 5, I, 9° ; CSS art. L 225-1-1, 3° ter modifiés).

 

Par ailleurs, À compter du 1-1-2024, le cotisant pourrait demander une prolongation de la durée de la période contradictoire dans les situations d’abus de droit afin de lui garantir les mêmes droits que pour tout autre cotisant contrôlé (PLFSS pour 2024 art. 5, I, 11° ; CSS art. L 243-7-1, A modifié).

 

Durée des arrêts de travail prescrits en téléconsultation limitée à 3 jours

 

Encadrement du recours aux plateformes de téléconsultation. Actuellement, la prescription des arrêts de travail dans le cadre d’une téléconsultation n’est pas limitée dans le temps.

 

À compter du 1-1-2024, lors d’un acte de télémédecine, la prescription ou le renouvellement d’un arrêt de travail par un autre médecin, autre que le médecin traitant du patient :

– ne pourrait porter sur plus de 3 jours (IJSS versées seulement durant 3 jours) ;

– et ne pourrait avoir pour effet de porter à plus de 3 jours la durée d’un arrêt de travail déjà en cours.

 

Deux exceptions. Cette limitation à 3 jours de la durée d’un arrêt de travail prescrit en téléconsultation ne s’appliquerait pas :

– lorsque l’arrêt de travail est prescrit ou renouvelé par le médecin traitant ; les prescriptions ou renouvellement d’arrêt de travail réalisées par le médecin traitant pourraient donc excéder la durée maximale de 3 jours.

 

– ou en cas d’impossibilité, dûment justifiée par le patient, de consulter en présentiel (dans les 3 jours) un médecin pour obtenir la prolongation de son arrêt de travail (PLFSS pour 2024 art. 28, I ; C. santé publique art. L 6316-1, al. 3 nouveau).

 

Les arrêts de travail prescrits en méconnaissance de ces règles ne pourraient pas ouvrir droit au versement de l’IJ au-delà des 3 premiers jours (PLFSS pour 2024 art. 28, II, 4° ; CSS art. L 433-1 modifié).

 

Prolongation d’un arrêt de travail par un acte de télémédecine.  La prolongation d’un arrêt de travail ne pourrait être réalisée par un acte de télémédecine que dans les mêmes conditions que pour la prescription de l’arrêt de travail initial ou son renouvellement de l’article L 6316-1, al. 3 du Code de la santé publique (PLFSS pour 2024 art. 28, II, 2° ; CSS L 162-4-4 modifié).

 

Condition de versement des IJSS. L’assurance maladie assurerait le versement des IJSS à l’assuré qui se trouve dans l’incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail qui a été constatée par le médecin et a donné lieu à la prescription d’un arrêt de travail lors d’une téléconsultation (PLFSS pour 2024 art. 28, II, 3° ; CSS art. L 321-1 modifié).

 

Condition de remboursement des actes et soins prescrits en téléconsultation. Les produits, prestations et actes prescrits au patient lors d’un acte de téléconsultation ainsi que les prescriptions réalisées lors des télésoins ne seraient couverts et pris en charge par l’assurance maladie que s’ils ont obligatoirement fait l’objet d’un échange oral en vidéotransmission ou téléphonique entre le prescripteur et le patient (PLFSS pour 2024 art. 28, II, 1° ; CSS art. L 160-8 modifié).

 

Limiter les arrêts de travail non justifiés

 

Pour réduire les dépenses d’indemnités journalières (IJ) versées par l’assurance maladie, il est prévu de renforcer les capacités de contrôle des caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) et des employeurs et d’accentuer les sanctions en cas d’arrêt de travail qui ne seraient pas ou plus justifiés. Le PLFSS pour 2024 prévoit de suspendre le versement des indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) à compter du rapport du médecin contrôleur délégué par l’employeur qui conclut au caractère injustifié de l’arrêt de travail. Mais l’assuré pourrait exercer un recours devant le service médical de contrôle (PLFSS pour 2024 art. 27).

 

Procédure de mise sous accord préalable (MSAP). Comme pour le contrôle des prescriptions des médecins, le directeur de la CPAM pourrait subordonner à l’accord préalable du service du contrôle médical, pour une durée ne pouvant excéder 6 mois et après que le centre de santé ou la société de téléconsultation aura été mis en mesure de présenter ses observations, le versement des IJSS prescrites par les professionnels de santé exerçant au sein de ces structures, en cas de constatation par ce service :

 

du non-respect des conditions de versement des IJSS pour maladie ou accident, professionnel ou non (CSS art. L 321-1 et L. 431-1, 2°) ;

 

d’un nombre ou d’une durée d’arrêts de travail prescrits par les professionnels exerçant au sein du centre de santé ou de la société de téléconsultation et donnant lieu au versement d’IJSS ou d’un nombre de ces arrêts de travail rapporté au nombre de patients pour lesquels au moins un acte ou une consultation a été facturé au cours de la période considérée significativement supérieurs aux données moyennes constatées pour les centres de santé ou sociétés de téléconsultation ayant une activité comparable dans le ressort de la même agence régionale de santé ou au niveau national (PLFSS pour 2024 art. 27, I, 2°-b et c ; CSS art. L 162-1-15, I bis, 1° et 2° nouveau).

 

Toutefois, en cas d’urgence attestée par le professionnel de santé prescripteur, l’accord préalable du service du contrôle médical de la CPAM ne serait pas requis pour le versement des IJSS.

 

À noter. Les sociétés de téléconsultation agrées par les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé peuvent demander à l’assurance maladie de prendre en charge des actes de téléconsultation réalisés par les médecins qu’elles salarient (C. santé Publique art. L 4081-1).

 

Suppression de l’avis de la commission des pénalités financière. Pour soumettre prescription du professionnel de santé exerçant au sein du centre de santé ou de la société de téléconsultation qui donnent lieu au versement des IJSS à l’accord préalable du service du contrôle médical, l’avis préalable de la commission des pénalités financière serait supprimé à compter du 1-2-2024, afin de réduire les délais d’instruction (PLFSS pour 2024 art. 27, I, 2°-a et II ; CSS art. L 162-1-15, I modifié).

 

Une alternative à la MSAP : procédure de mise sous objectifs. Le directeur de la CPAM pourrait également, conjointement avec le service du contrôle médical, proposer au professionnel de santé du centre de santé ou de la société de téléconsultation, en alternative à la procédure de mise sous accord préalable, de s’engager à atteindre un objectif de réduction des prescriptions ou réalisations en cause dans un certain délai. En cas de refus du professionnel de santé, le directeur pourrait poursuivre la procédure de mise sous accord préalable (CSS art. L 162-1-15, II modifié).

En cas d’une contre-visite organisée par l’employeur

 

Rappel. Les salariés (sauf les salariés travaillant à domicile, les salariés saisonniers, les  salariés intermittents et les salariés temporaires) ayant une année d’ancienneté dans l’entreprise bénéficie, en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, d’une indemnité complémentaire à l’IJSS versée par l’employeur, à condition d’avoir justifié dans les 48 heures de cette incapacité, sauf si le salarié est victime d’un acte de terrorisme, d’’être pris en charge par la sécurité sociale et d’être soigné sur le territoire français ou dans l’un des autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans l’un des autres Etats partie à l’accord sur l’Espace économique européen (C. trav. art. L 1226-1).

Le service du contrôle médical constate les abus en matière de soins, de prescription d’arrêt de travail et d’application de la tarification des actes et autres prestations (CSS art. L 315-1, al. 1).

 

Rapport de la contre-visite. Lorsqu’un contrôle effectué par un médecin du service du contrôle médical à la demande de l’employeur, en application de l’article L 1226-1 du Code du travail, conclurait à l’absence de justification d’un arrêt de travail ou de sa durée, ou fait état de l’impossibilité de procéder à l’examen de l’assuré, le médecin contrôleur devrait transmettre son rapport au service du contrôle médical de la CPAM dans un délai maximal de 72 heures (contre 48 heures actuellement). Ce rapport devrait préciser si le médecin diligenté par l’employeur a ou non procédé à un examen médical de l’assuré (PLFSS pour 2024 art. 27, I, 3°-a : CSS art. L 315-1, II al. 3 modifié).

 

Suspension des IJSS. Si le rapport du médecin conclut à l’absence de justification de l’arrêt de travail ou de sa durée, le médecin devrait en informer également, dans le même délai, la CPAM qui suspendrait le versement des IJSS. Cette suspension prendrait effet à compter de la date à laquelle l’assuré aura été informé de cette décision. Toutefois, si le médecin contrôleur estime que l’arrêt de travail est justifié pour une durée inférieure à celle fixée par le médecin prescripteur, la suspension prendrait effet à l’échéance de la durée retenue par le médecin contrôleur (CSS art. L 315-1, II al. 4 modifié).

 

Nouveau contrôle du salarié. Au vu du rapport, le service du contrôle médical pourrait décider de procéder à un nouvel examen de la situation de l’assuré. S’il décide de procéder à cet examen, il ne serait pas fait application de la suspension du versement des IJSS jusqu’à ce que le service ait statué. (CSS art. L 315-1, II al. 5 modifié).

 

Recours du salarié contrôlé devant le service du contrôle médical. L’assuré pourrait également demander à son organisme de prise en charge de saisir le service du contrôle médical pour un examen de sa situation. Le délai dans lequel cette demande devrait effectuée ainsi que le délai dans lequel devrait intervenir le nouvel examen de la situation de l’assuré devraient être fixés par décret (CSS art. L 315-1, II al. 6 nouveau).

 

Lorsque le rapport fait état de l’impossibilité de procéder à l’examen de l’assuré, le service du contrôle médical ne pourrait demander la suspension du versement des IJSS qu’après un nouvel examen de la situation de l’assuré (CSS art. L 315-1, II al. 7nouveau).

 

PLFSS pour 2024, n° 1682 art. 5, 27 et 28.

© Lefebvre Dalloz

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